J’ai acheté le livre de Natacha Birds à la troisième hésitation. Je l’ai reconnu, je l’ai survolé et je me suis dit que, vraiment, son univers était très loin du mien. Et puis j’ai eu envie d’y revenir. Je l’ai retrouvé, je l’ai feuilleté et je me suis dit que, vraiment, ce n’était pas un livre pour moi. Et puis j’y suis retourné et, vraiment, je n’ai plus eu envie de le quitter. Et c’est un peu ce que j’ai fait avec ses créations, ces dernières années.
L’univers de Natacha Birds est réellement loin du mien. Déjà, je n’aime pas le violet. Ni les paillettes. Ni les sirènes. J’ai même été dérangée par sa voix, la première fois que je l’ai entendue. Et pourtant, il y a ce je ne sais quoi qui me fait revenir, systématiquement. Le craquement d’une vidéo, le détail d’une lumière, l’intonation d’un mot… Ce petit quelque chose qui me touche réellement. Et qui me rend complètement accro.
J’ai dévoré son livre, je dois le dire. Dévoré… Mais lentement. En ralentissant un peu pour ne pas le finir trop vite. En relisant chaque petit bout de mot qui n’aurait pas eu la résonance qu’il mérite, comme un enfant qui apprend sa leçon.
« Apprendre à se défaire de l’importance du regard des autres, du mauvais stress, de l’appréhension… Apprendre à se débarrasser de l’influence du monde, des empreintes qui ne sont pas les nôtres. […] apprendre à surpasser la peur. La peur de l’échec, et celle de la déception. »
J’ai été plutôt surprise. Parce qu’elle non plus n’aimait pas le violet. Parce qu’elle aussi aimait plus les mots que leur sens. Parce qu’elle s’inspire de Pushing Daisies et de Boulevard de la mort (et, si sous la contrainte -la plus effroyable- je devais choisir une scène dans tous les Tarantino, je crois que je garderais le lap-dance de Butterfly).
Il n’y a finalement rien d’étonnant à ce que je revienne à elle, systématiquement. C’est ces petites choses, dissimulées sous le violet et le kawaï, qui font échos à mon vécu et mes propres inspirations.
Les plans larges de Tarantino. Les morceaux de couleurs volés. Le sous-titrage jaune des vieux films. La poésie du quotidien. A mi chemin entre Mia Wallace et Amélie Poulain. Entre Prévert et Alice au pays des merveilles. Entre photo, vidéo et cinémagraphe.
J’ai fermé ce livre un soir de pleine lune dans mon van perché au milieu de la montagne, et la nuit blanche qui a suivie, je me suis rendue compte que j’avais perdu quelque chose. Moi, la fille qu’on dit insensible et qui s’attache à des choses dérisoires, j’avais oublié de me laisser bouleverser par ce qui me fascinait avant. Le scintillement de la poussière. Le craquement des vinyles. Les reflets du TGV sur les murs du salon. Comme si j’avais oublié de me laisser m’émouvoir du dérisoire.
Cette nuit, j’ai décidé de me reconnecter à cette émotion, à mon intuition et à mon hyper-sensibilité. Le lendemain matin, j’ai trouvé que son livre était assorti au lever de soleil sur la montagne.
Je n’ai pas l’habitude de parler de livre par ici (et pourtant c’est une grande partie de ma vie), mais celui-ci est de ceux que je vais garder près de moi comme un pense-bête. Pour garder l’envie de m’émouvoir. L’envie et le besoin d’être toujours inspirée.
« J’inspire, j’expire.
Inspirez, expirez.
Sans vous arrêter. »
